NEADS Conférence 2004 - Tout Droit!

Conférenciers

Mahadeo Sukhai

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Biographie

Mahadeo Sukhai est étudiant en cinquième année au doctorat au Department of Medical Biophysics de l’Université de Toronto; sa vision est faible. Il est le président pour 2004-2005 du Graduate Students’ Union et est l’étudiant membre, à l’Université de Toronto, du comité de coordination du processus de planification de l’accessibilité de la Loi sur les personnes handicapées de l’Ontario. Mahadeo a joué un rôle de premier plan dans de nombreuses initiatives d’amélioration de l’inclusivité des étudiant(e)s handicapés à l’Université de Toronto.

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Synopsis

Élaboration d’un réseau de collaboration : L’Expérience de l’Université de Toronto.

Les étudiant(e)s handicapés font face à beaucoup d’obstacles à l’inclusion dans la vie sur le campus et dans les activités à l’extérieur de la classe dans l’enseignement postsecondaire. L’accessibilité et le caractère inclusif des événements, le manque de financement et de prestation d’aménagements pour les personnes handicapées et, souvent, le manque d’espace social ou de réseau d’étudiant(e)s handicapés sont quelques-uns des obstacles à l’inclusion. Est-ce qu’une personne en fauteuil roulant électrique peut aller au pub ou au restaurant du campus par exemple? Est-ce qu’il y a des espaces sociaux et des coins salons qui sont accessibles?

L’élaboration et le maintien de Students for Barrier-Free Access (SFBA) à l’Université de Toronto et son influence sur le mouvement étudiant général chez les diplômés (par l’entremise du Graduate Students’Union), chez les étudiants de premier cycle (par l’entremise du Students’ Administrative Council) et sur l’administration de l’université donnent lieu à une étude de cas d’un mouvement cohérent et à long terme d’étudiant(e)s handicapés. Nous avons voulu établir une présence à l’intention des étudiant(e)s handicapés, sensibiliser, éduquer, exercer des pressions efficacement influencer directement un grand nombre des problèmes systémiques au moyen du réseau que nous avons établi. Ce travail a fini par donner lieu à la création en septembre 2004 du nouveau « Access Centre » de l’Université de Toronto, pour lequel les étudiant(e)s ont versé des droits.

Le processus de planification de l’accessibilité requis par la Loi sur les personnes handicapées de l’Ontario 2001 nous a fourni une occasion unique de traiter les questions de l’inclusion dans l’environnement du campus d’une façon systématique et à long terme. Au cours de l’élaboration du processus de planification de la Loi, Students for Barrier-Free Access et le GSU ont voulu concrétiser la vision d’un environnement inclusif pour les étudiant(e)s handicapés en élaborant des initiatives conformes au Plan. Le « Access Centre » de SFBA s’appuie sur ses réalisations antérieures; il est à la fois une source de financement et une présence à temps plein en ce qui concerne les questions relatives aux personnes handicapées à l’Université de Toronto, en plus de faire partie intégrale du Plan de l’Université pour 2004-2005 concernant la Loi sur les personnes handicapées de l’Ontario.

Le mouvement des étudiant(e)s handicapés à l’Université de Toronto a également profité d’une influence accrue au sein du mouvement étudiant général puisque des membres de Students for Barrier-Free Access ont été élus au sein des conseils exécutifs d’associations étudiantes de l’Université. Ceux et celles qui réussissent à occuper des postes de leadership dans leurs associations étudiantes sont également aux prises avec des obstacles en matière d’aménagement et avec l’inertie organisationnelle d’un mouvement étudiant général qui n’a jamais été préoccupé par les problèmes des étudiant(e)s handicapés. Aucune association étudiante n’est en elle-même un modèle idéal d’inclusion, parce qu’elles ont toutes des problèmes et des défis différents à affronter pour intégrer les étudiant(e)s handicapés et leur offrir les adaptations nécessaires.

Cet exposé sera axé sur le « Access Centre » en tant que modèle de collaboration entre les étudiant(e)s et l’administration à l’Université de Toronto; il décrira la planification et tout ce qui entouré la création du centre et de ses projets. On retracera brièvement l’histoire de Students for Barrier-Free Access et on se penchera sur ce que peuvent nous enseigner les expériences des étudiants de la génération des étudiant(e)s handicapés qui font avancer leur cause en luttant pour l’inclusion dans l’environnement du campus.

Rapport

Mahadeo Sukhai, président, Graduate Students' Union, Université de Toronto, décrit les efforts de sensibilisation aux questions concernant les étudiants handicapés et leur inclusion dans la vie du campus à l'Université de Toronto. Il énonce d'abord un point de vue philosophique sur le « monde » de l'activisme des personnes handicapées, qui prend deux formes :

  • un mouvement général composé d'organismes, de coalitions et de regroupements qui travaillent en gros en fonction des mêmes objectifs;
  • des « ambassadeurs sans attache » qui représentent ce que les personnes handicapées ont de mieux à offrir, mais qui préfèrent ne pas s'engager dans une structure formelle.

Ces deux groupes collaborent et échangent des commentaires mais il y a aussi une certaine tension entre eux. Le mouvement étudiant général (pas seulement les étudiants handicapés) peut être très monolithique et enclin à adopter l'attitude « quiconque n’est pas avec nous est contre nous ». L'avancement de la cause des personnes handicapées ne passe cependant pas toujours par le mouvement des étudiants handicapés.

Ce dernier a ses forces et ses faiblesses. Ses points forts tiennent au nombre de ses membres, à ses capacités organisationnelles, à la mise sur pied de coalitions, à sa durabilité et à son accès à des ressources financières. Ses points faibles tiennent à sa représentativité réelle et à la présence du facteur du « plus petit dénominateur commun », à savoir s'il peut parler au nom de tous sans pour autant être limité au « plus petit dénominateur commun ».

Les gens qui tiennent le rôle d'« ambassadeur sans attache » ont aussi leurs forces et leurs faiblesses. Ils peuvent parler sans intermédiaire et sont les seuls maîtres de leurs tactiques d'intervention. Leur bonne réputation les précède et l'exemple qu'ils donnent est motivant. De plus, ils peuvent s'intégrer aux organismes du campus sans être assimilés.

L'un des problèmes, c'est qu'après leur départ, il ne reste aucune structure pour continuer leur travail. Les questions de permanence ou d'argent conditionnent peu leurs activités. En dernière analyse, le travail réalisé par ces ambassadeurs se réduit à la « vision du monde d'une personne ».

À l'Université de Toronto, ces deux mondes travaillent en partenariat. Le climat amical créé par les « ambassadeurs sans attache » a mené à la formation d'un mouvement d'étudiants handicapés. Ce mouvement, à son tour, a créé un environnement propice au mentorat et à la défense individuelle des intérêts.

Au cours des trois dernières années, à l'Université de Toronto, la sensibilisation aux questions concernant les personnes handicapées et les mesures prises à leur égard ont augmenté et la situation s'est améliorée. L'approche systémique qui a permis cette évolution fait appel à la collaboration entre les étudiants, les fournisseurs de services, l'administration, le personnel et les anciens élèves.

L'approche retenue par les étudiants a consisté à établir une présence pour les étudiant(e)s handicapés, à sensibiliser et à éduquer, à déterminer des stratégies de lobbying et à donner l’exemple. Leur réussite tient pour une grande part au fait qu’ils ont su saisir les occasions et comprendre le système. La constitution d'un réseau suppose qu'il faut savoir ce que font les gens, à qui parler, comment les aborder, comment fonctionne la gouvernance et comment faire un lobbying efficace. Le recours stratégique à des manifestations peut également s'avérer efficace.

L'Université de Toronto, dit Sukhai, a formulé un énoncé de vision pour un campus inclusif. Il fait aussi état du processus de planification que la Loi de 2001 sur les personnes handicapées de l'Ontario (LPHO) impose au secteur public en Ontario et aux organismes figurant en annexe en vue d'élaborer des plans annuels d'accessibilité, lesquels doivent identifier les obstacles et présenter des initiatives pour les supprimer.

Dans la deuxième année de son processus de planification en vertu de la LPHO, l'Université de Toronto a mis sur pied un comité consultatif général, composé de 40 membres, dont des personnes handicapées. Ce comité, qui a lui-même créé sept sous-comités et un comité de coordination, a poursuivi ses travaux de février à juillet 2004 et a produit un rapport de 98 pages sur les initiatives entreprises en 2003-2004. Il a également présenté 40 initiatives pour 2004-2005. Ces initiatives portent sur les attitudes (les questions concernant les personnes handicapées et la formation initiale, par exemple), les questions pratiques (séminaires sur l'aménagement organisationnel et la polysensibilité chimique, par exemple), la technologie et la conception du matériel pédagogique.

La participation des étudiants s'est soldée par la mise en place d'un certain nombre d’éléments, notamment une série de conférences intitulée Breaking Down Barriers 2004, une campagne d'affichage, un engagement formel à l'égard des personnes handicapées et le Access Centre.

Breaking Down Barriers, qui en est à sa deuxième conférence, est devenu un modèle pour les efforts de sensibilisation et d'éducation à la base. L’objectif est la durabilité à long terme et des délégués de l'extérieur de la communauté universitaire participent.

Dans la campagne des affiches de sensibilisation, on voit 11 étudiants de divers groupes, inscrits à divers programmes d'études et ayant divers handicaps. Ces étudiants sont principalement des « ambassadeurs sans attache » qui se sont portés volontaires pour paraître sur ces affiches. Cette campagne n'aurait pas été possible il y a quatre ans.

L'accessibilité a considérablement augmenté à l'université, où plusieurs projets distincts en plus de ceux prévus par le plan LPHO ont été proposés. Ces initiatives supplémentaires comprennent des laboratoires de chimie accessibles, des sites Web avec un accès modifié et amélioré et une anthologie sur la condition des personnes handicapées.

L'autonomie organisationnelle va de pair avec une certaine « masse critique ». Il y a quatre ans, quelques personnes à l'université œuvraient isolément sur les questions d'accessibilité. Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui travaillent ensemble de façon informelle à l’instauration d’un climat accueillant et à la préparation du terrain pour des mesures ultérieures.

Le système n'est pas sans problèmes : aucun engagement de ressources n'a été obtenu de la part du gouvernement provincial, ni des institutions et départements. L'inertie institutionnelle joue également. Comment, par exemple, accorder l'équité et l'accessibilité avec la méritocratie de l'Université de Toronto et les préoccupations quant à la dilution des normes? Une certaine indifférence administrative existe – qui devient parfois résistance –, comme d'ailleurs un certain degré d'indifférence communautaire, du fait que les étudiants handicapés ne représentent que 2 % de la population universitaire. Mais 2 % d'une population étudiante totale de 70 000 signifie quand même un grand nombre d'étudiants. Sukhai souligne qu’il ne faut pas se contenter de l’équité : il faut aussi prendre des mesures.

Sukhai parle de la création du Graduate Accessibility Committee (GAC), qui a pour mandat d'améliorer la qualité et l'accessibilité des études supérieures pour les étudiants handicapés. Ce groupe de recherche, de réflexion et de lobbying a réussi à faire adopter par la Graduate Students Union une politique sur l'accessibilité en avril 2003. Le GAC a participé à plusieurs groupes de travail et comités et a élaboré sa propre stratégie de lobbying ciblé, reposant sur un vaste réseau de contacts.

Un autre organisme important, Students for Barrier-Free Access (SFBA), fondé en 2002, assure la promotion des intérêts et l'intervention directe pour le compte des étudiants handicapés. Il a récemment mis sur pied l’Access Centre, financé avec les cotisations du Students' Administrative Council et créé en réponse aux documents de planification de la LPHO, qui identifiaient les obstacles rencontrés par les étudiants handicapés et qui pourraient être supprimés par la création d'un tel centre. Le modèle de gouvernance du Centre garantit une représentation étudiante majoritaire, ainsi que la présence de membres du gouvernement étudiant.

En conclusion, Sukhai affirme qu'un climat de collaboration s'est instauré à l'Université de Toronto depuis trois ans. La création du SFBA Access Centre constitue un grand pas en avant et marque la permanence du mouvement.