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Nancy Hansen

Biographie

Nancy Hansen est directrice intérimaire du programme interdisciplinaire de maîtrise en étude de la condition des personnes handicapées à la University of Manitoba. Nancy détient un doctorat de la University of Glasgow, où elle a rédigé une thèse sur l’incidence des politiques sociales et des politiques en matière d’éducation sur les expériences d’emploi des femmes ayant une déficience physique. Au niveau postdoctoral, ses recherches ont porté sur l’accès des femmes handicapées aux soins de santé primaire. Son étude de la condition des personnes handicapées à la lumière des travaux d’eugénique menés par les nazis lui a valu la bourse de recherche Einstein. Présidente de la Canadian Disability Studies Association (CDSA), Nancy a reçu en juin 2006 la bourse Sprott de gestion des biens décernée par la Ireland-Canada University Foundation, à la suite de ses recherches sur l’histoire des personnes handicapées en Irlande. Depuis de nombreuses années, Nancy participe étroitement aux activités de groupes canadiens qui se vouent aux personnes handicapées.

Études de la condition des personnes handicapées : un nouvel horizon et un avenir sur mesure

Nancy Hansen, directrice intérimaire, programme interdisciplinaire de maîtrise en étude de la condition des personnes handicapées, University of Manitoba

En quoi consistent les études de la condition des personnes handicapées ?

Il y a quelques années à peine, les déficiences auraient fait l’objet d’études menées selon une perspective médicale, croit Nancy Hansen. La discipline a fait de grands progrès en très peu de temps. Les études de la condition des personnes handicapées constituent encore un champ nouveau, mais celui-ci est en voie de tracer un nouvel horizon pour les universités, et ce, en procédant par la base. Les collèges et universités de tout le pays ont établi des programmes ou des éléments dans ce domaine, qui connaît une forte croissance. Les arts et la culture de la déficience ont droit de cité d’un océan à l’autre. Mais par-dessus tout, les études de la condition des personnes handicapées mobilisent les personnes handicapées elles-mêmes, dont la présence fait progresser les opinions et les pratiques bien ancrées en première ligne. De préciser Madame Hansen, « nous sommes en voie de passer derrière le pupitre, mais il reste encore des obstacles à franchir ».

En matière de recherche sur la condition des personnes handicapées, une question centrale se pose : « De quelles sources provient le savoir qui importe ? » Dans une grande mesure, l’examen des enjeux liés aux déficiences s’est fait en l’absence des personnes handicapées, de sorte qu’on n’a pas tenu compte de leur expérience et de la base de connaissances qu’elles possèdent. Par rapport aux autres, ce domaine tarde à se rallier à l’idée voulant que la diversité constitue une force. Encore aujourd’hui, la recherche dominante est sensible aux hypothèses discriminatoires fondées sur la capacité physique. Toutefois, les études de la condition des personnes handicapées commencent à faire évoluer les perspectives.

La participation des personnes handicapées a contribué à détourner les chercheurs du processus d’objectivation. Néanmoins, la réponse à la question précitée — qui porte essentiellement sur la validité des connaissances — continue d’alimenter la discorde. Aujourd’hui encore, les conditions d’adhésion au milieu de la recherche universitaire sont fixées par des membres de la majorité non handicapée.

La situation progresse, mais il ne faut pas se contenter de prêcher une orthodoxie intellectuelle remaniée dont l’exactitude n’est pas toujours démontrée. Un changement de cap fondamental s’impose pour que la déficience en vienne à faire partie intégrante du discours de recherche. Les vérités reconnues doivent être contestées avec la même énergie que l’on déploie dans d’autres disciplines.

Nous avons besoin de processus novateurs en matière de financement et de mise en commun du savoir, et ces processus doivent confier une fonction de corroboration aux personnes handicapées. Pareille démarche repose sur la reconnaissance et l’acceptation du fait que la déficience constitue un mode de vie naturel.

Les chercheurs handicapés sont en voie de changer la manière dont s’opère la recherche, notamment par l’adoption de méthodes participatives. Par exemple, un anthropologue en chaise roulante se tournera vers Internet pour réaliser des études sur le terrain. De telles pratiques ont d’abord éveillé une certaine résistance, mais s’imposent désormais peu à peu.

Selon Madame Hansen, « une personne dont les mouvements et le niveau d’énergie sont distincts accorde une plus grande importance au temps et à l’organisation spatiale ». Il faut trouver de nouvelles solutions pour composer avec l’environnement physique et l’environnement de recherche. Souvent, les chercheurs handicapés se retrouvent sous les projecteurs, à tenter de démontrer leur professionnalisme. Le fait de devoir se conformer à un milieu conçu pour les non-handicapés exige un grand doigté et, partant, de grands efforts. Pourtant, dans bien des domaines, la présence et l’apport de ces personnes provoquent une révision des sujets, du financement, des perspectives et des stratégies en matière de recherche.

Des organismes tels que le Canadian Centre on Disability Studies (CCDS) octroient de modestes subventions pour soutenir la recherche sur la condition des personnes handicapées. De concert avec le milieu universitaire et les collectivités, le CCDS s’efforce de modifier la manière dont on perçoit la déficience.

Les personnes handicapées ne définissent pas les grands concepts (politiques, économiques et sociaux) sur lesquels repose notre monde. Par contre, dans une optique perceptuelle, elles dictent un sens au monde par leur imagination et leur discours. Cette conceptualisation intérieure justifie l’accès et la connaissance. La présence des chercheurs handicapés façonne de nouvelles perceptions. Ces intervenants peuvent servir d’intermédiaires entre les cercles fermés du savoir et la grande collectivité des personnes handicapées.

Madame Hansen conclut son exposé par une mise en garde. Dans bien des disciplines, il est « de bon ton » de faire participer les groupes minoritaires. Cependant, la domestication simpliste des enjeux connexes alimente l’inquiétude. Le danger du « tourisme de l’autre » nous guette — une démarche qui occulte les questions de fond. En bout de ligne cependant, Madame Hansen croit que la participation des personnes handicapées et les études axées sur leur condition favorisent le changement.

Au cours de l’échange qui fait suite à l’exposé, on demande à Madame Hansen d’expliquer comment les individus qui ne participent pas directement aux études de la condition des personnes handicapées peuvent assurer une liaison efficace entre cette discipline et les autres. La conférencière répond ainsi : « Quelle que soit leur trajectoire, les études de la condition des personnes handicapées peuvent s’intégrer à votre discipline. Dans la même veine, elles peuvent interagir avec des disciplines plus classiques. »

Priée de s’exprimer sur l’arbitrage à faire entre le maintien d’un engagement envers le paradigme de recherche émancipatoire et le respect du travail au niveau des collectivités, Madame Hansen fait valoir « qu’il s’agit d’une affaire de dignité et de respect, de mordre sur ce qui se laisse mordre ». À son avis, il est capital de faire preuve de persévérance et de professionnalisme. Il faut aussi comprendre que le changement demande du temps et que les études de la condition des personnes handicapées imposent un nouveau mode de pensée à bien des gens.

En célébration de 20 années